.jpg)
Buffy : avant la série mythique, retour sur le nanar originel
Avant Buffy, il y avait Buffy : un monde avec des vampires qui font tout sauf peur et où le grand méchant meurt en laissant échapper un “Oops”.
Difficile d’imaginer Buffy roder dans un cimetière, un pieu à la main, en legging rose bubble gum et veste de cheerleader. Et pourtant : si on se représente la Tueuse de vampires sous les traits de Sarah Michelle Gellar, il y a d’abord eu un film Buffy, sorti dans les salles américaines en 1992. Alors que la série s’apprête à revenir sur le petit écran avec Ryan Kiera Armstrong dans la peau d’une nouvelle Tueuse, retour aux origines du mythes, avec une première comédie digne d’une série B poussiéreuse.
.jpg)
Buffy meets the Plastics
C’est sur une chorégraphie de cheerleaders que s’ouvre Buffy, Tueuse de vampires, le film : pendant que le titre s’affiche en grosses lettres roses, le public découvre l’héroïne adolescente sous les traits de Kristy Swanson, uniforme jaune et pompons en mains. La lycéenne, qui passe la majorité de son temps à Hemery High, ne sait encore rien de son rôle d’Élue : ce qu’elle aime c’est la gym, le shopping et remballer les mecs relous au ciné. En plein dans le stéréotype de la lycéenne naïve et superficielle, Buffy et ses copines partagent plus de points communs avec les Plastiques de Mean Girls qu’avec le Scooby Gang et ses liens coopératifs.
Du moins, jusqu’à ce qu’entre en scène Merrick, l’Observateur de la Tueuse, campé par Donald Sutherland. Tout droit sorti d’une autre époque, le cinquantenaire ne quitte jamais son chapeau haut de forme, son grand blouson et son mouchoir en tissu. Buffy découvre alors sa destinée, l’existence de sa force surhumaine – elle épingle une mouche en plein vol en crachant une punaise… – et surtout, l’existence des vampires. Canines aiguisées et oreilles pointues, les vampires (dont Paul Reubens et David Arquette) sont pourtant loin d’être discrets : ils flottent dans les airs et s’envolent pour mettre un dunk mais heureusement pour eux, personne ne s’en soucie. Buffy, plus portée sur le shopping que sur les pieux en bois, rejette d’abord ses nouvelles responsabilités, avant d’accepter sa mission et de déjouer une attaque de vampires dans le gymnase du lycée.
Une comédie teen
Réalisé par Fran Kuzui, ce premier film est basé sur un script de Joss Whedon. Nous sommes au début des années 90 et, bien avant d’être accusé de misogynie et de créer des environnements de travail toxiques lors du mouvement MeToo, le scénariste écrit alors pour des sitcoms (Roseanne et Parenthood) et travaille en tant que script doctor sur certains films, dont Waterworld et Twister. Après avoir visionné pas mal de films d’horreurs qui mettent en scène des “blondes écervelées trainer dans des allées sombres et être tuées par une créature”, il imagine une comédie horrifique renversant le rapport de force et réalise qu’il adorerait “voir un film dans lequel une blonde traine dans une allée sombre, n’a besoin de personne et déploie ses forces”. Fran Kuzui, qui a déjà réalisé un film auparavant et travaille pour la 20th Century Studios, reprend le scénario avec son auteur pour le faire valider par la société de production. Sauf que très vite, Joss Whedon voit son film lui échapper : ses aspects sombres sont coupés et Buffy devient une production camp [où certains éléments ou scènes sont expressément exagérés, comme la mort du vampire Amylin, ndlr] frôlant la parodie de film d’horreur.
Aux ingrédients classiques du teen movie US se superposent une esthétique kitsch, des effets en carton-pâte et une mise en scène bâclée. Last but not least : en français, Buffy contre les vampires est titré Bichette la terreur : Buffy est surnommée Bichette, et Pike est renommé Marcel. Toujours est-il que le film, qui reçoit des critiques plutôt négatives, s’avère rentable au box-office. Mais Joss Whedon ne se remet pas de ce qu’est devenu son scénario : le versant émotionnel et la dimension dramatique du film ont été rognés au profit de gags cheap et lourdingues. Car ce qu’imaginait Joss Whedon avec Buffy, c’était surtout une vaste métaphore des tourments adolescents, puis de la vie en général, dans laquelle l’enfer des années lycée se matérialiserait dans les forces du mal.
.jpg)
La Tueuse, nouvelle génération
Une poignée d’années plus tard, le scénariste a l’opportunité de donner une seconde vie à son héroïne, lorsque la productrice Gail Berman lui propose de réaliser une série à partir de son scénario. Évidemment, pas question de prendre les mêmes pour recommencer : le showrunner et réalisateur renouvelle l’entièreté du casting, Sarah Michelle Gellar en leadeuse, et tourne un pilote pour The WB. Pas convaincu par le résultat, la chaîne américaine préfère diffuser Sept à la maison, mais l’annulation du soap-opéra Savannah quelques mois plus tard laisse enfin un créneau à la Tueuse de vampires. Le 10 mars 1997, la chaîne The WB diffuse le pilote de Buffy, Tueuse de vampires, qui fera très vite oublier le film de 1992 grâce à une écriture bien plus approfondie mêlant drame et comédie.
Sans renier ses origines, le pilote “Welcome to the Hellmouth” fait référence au film dans les premières minutes, lorsque Buffy est accueillie par le principal de Sunnydale High School : “Buffy Summers. Étudiante en seconde année, ancienne élève de Hemery High. Dossier intéressant. Toute une carrière… Bienvenue à Sunnydale”. La version télévisée de Buffy débarque donc à Sunnydale avec le passé de sa prédécesseure, et connaît déjà les vampires et sa lourde mission. Et comme la première version de l’héroïne, Buffy Summers cauchemarde à cause de la lignée de Tueuse dont elle descend et des démons qui veulent sa peau. Fran Kuzui et son mari continueront d’ailleurs à être crédités sur la série, sans jamais avoir été impliqués dans sa production.
Réalisé par une cinéaste qui n’avait pas la vision de Joss Whedon, cette première Buffy aux intentions et au ton radicalement différents n’a surtout pas grand chose à voir avec la série qui bousculera le paysage télévisuel quelques années plus tard. On y trouve quand même quelques répliques intéressantes, comme ce lycéen qui raconte l’assaut de vampires à une journaliste : “Ils avaient des crocs, ils mordaient les gens… Ils avaient ce regard dans les yeux, totalement froid, animal. Je pense que c’était des jeunes Républicains”. Est-ce que ça vaut un visionnage du film pour autant ? Pas forcément. A la place on peut relater la série dans son intégralité, ça tombe bien puisqu’on a classé les saisons de Buffy de la meilleure à la moins meilleure.

Identifiez-vous! (c’est gratuit)
Soyez le premier à commenter!