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Battre le cancer, accompagnée de TikTok

Ou comment Alexandra a traversé sa maladie.

Par
Léonie Poulin
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Si vous aviez dit à la Alexandra Marquis d’il y a un an qu’une vidéo d’elle qui se rase la tête en compagnie de son frère serait vue plus d’un million de fois, elle n’y comprendrait probablement rien.

Elle serait encore plus choquée d’apprendre qu’elle a fait ce choix après avoir reçu un diagnostic de cancer qui la forcerait à mettre un frein à ses études. « Je n’arrêtais pas de me répéter que c’était temporaire », explique-t-elle en se remémorant cette période tumultueuse.

Comme beaucoup d’autres jeunes femmes de sa génération, Alexandra aimait publier des vidéos de danse sur TikTok. Jusqu’à ce qu’un premier symptôme apparaisse : sans trop savoir pourquoi, son visage s’est mis à enfler. Après une semaine sans que son état ne s’améliore, elle s’est rendue à l’urgence où les médecins lui ont diagnostiqué un lymphome de Hodgkin, un cancer du système lymphatique.

Les médecins la rassurent en lui expliquant qu’il s’agit d’un cancer qui affecte plusieurs jeunes adultes et qu’il se guérit très bien.

« C’est super cliché ce que je vais dire, mais quand tu perds quelque chose, tu vois à quel point c’est important. Perdre la santé à un jeune âge, tu ne t’y attends pas », confie-t-elle.

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Quand le diagnostic tombe, Alexandra est dévastée. Elle s’efforce toutefois de voir le côté positif de sa situation : « J’ai passé de “pourquoi ça m’arrive”, à “OK, ça m’arrive, qu’est-ce que je vais retirer de ça?” », explique-t-elle.

Les réseaux sociaux, source de réconfort

On peut parfois avoir l’impression que TikTok est un espion en raison de l’efficacité redoutable de son algorithme qui semble toujours nous présenter des vidéos en lien avec notre quotidien. Alexandra peut en témoigner puisque, à peine quelques jours après son diagnostic, elle est envahie de vidéos montrant des personnes vivant avec un cancer au quotidien.

De découvrir cette communauté en ligne a été pour elle très réconfortant et a mené au véritable déclenchement d’une nouvelle aventure, soit celle de partager son propre quotidien sur TikTok afin d’à son tour rejoindre des personnes qui vivaient une situation similaire.

À ce moment, Alexandra faisait déjà face à un arrêt d’école et de travail pour une période de six mois. La création de contenu s’est avérée un projet qui lui a permis de passer le temps lors de cette période difficile.

« Moi aussi, je voulais participer à ça. Si ça peut réconforter d’autres personnes, tant mieux », dit-elle au sujet de cette décision.

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Grâce à son expérience en restauration et comme prof de danse, Alexandra est une personne plutôt à l’aise devant le public. Avec sa personnalité attachante, elle attire rapidement l’attention de nombreux internautes vivant la même situation.

Pendant ses six mois de chimiothérapie, elle aborde sa perte de cheveux, démystifie le cancer avec quelques fun facts et montre à quoi ressemble une journée de chimio. Spoiler : c’est un bon moment pour faire le point sur son état de santé. De fil en aiguille, ses vidéos l’aident à se changer les idées, malgré le fait que les journées qui suivent une séance de chimiothérapie sont difficiles. « Les journées avant la chimio sont particulièrement stressantes; tu sais que ton état physique va crasher vraiment vite. Au moins, je pouvais me dire : “C’est fun, je vais vlogger ma journée !” », raconte-t-elle.

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Au fil de ses vidéos, une communauté commence à se créer : des gens lui écrivent pour lui donner des conseils ou tout simplement pour lui dire qu’ils sont déjà passés par là, eux aussi.

Le soutien des proches

Au même moment où sa communauté grandissait, Alexandra a aussi eu la chance d’avoir du soutien exemplaire à la maison. « C’est sûr que ma mère a pleuré, mais elle ne me l’a jamais montré », raconte Alexandra.

Avant son cancer, Alexandra n’aurait pas nécessairement eu le réflexe de confier ce qu’elle vivait à ses proches. Or, pendant son parcours, elle s’ouvre de plus en plus, ce qui l’aide à dédramatiser sa situation. L’empathie de ses proches s’avère pour elle un véritable pilier :

« J’étais capable de dire qu’aujourd’hui, je suis en pétard, puis ils me disaient que c’était correct. Ils n’essayaient pas de me convaincre du contraire. […] Ils me laissaient évacuer, chose que je ne faisais pas du tout avant », confie-t-elle.

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Faire une croix sur sa vie d’avant

Malgré qu’elle soit officiellement en rémission, Alexandra doit tout de même faire le deuil de son ancienne vie. « Je ne serai plus jamais la fille qui vit avec l’innocence de “tout va bien”. J’ai toujours [le cancer] qui va me guetter un peu en arrière. »

Tout au long du processus, Alexandra s’est beaucoup écoutée, même lorsque des proches lui apportaient de l’aide qu’elle ne voulait pas nécessairement. « Au début, mes amis m’envoyaient des liens pour des sites de perruques parce qu’ils voulaient m’aider, mais je n’étais pas prête à regarder ça », raconte-t-elle.

Pendant presque l’entièreté de ses traitements, Alexandra ne voulait pas s’impliquer dans des organismes venant en aide aux personnes atteintes du cancer, un peu comme si le simple fait d’y participer aurait rendu le tout officiel. Par exemple, elle n’a pris que très tardivement un rendez-vous avec Belle et bien dans sa peau, un organisme qui offre des cours de maquillage aux personnes ayant perdu leurs cheveux et sourcils suite à des traitements de chimio.

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Finalement, c’est quand elle est approchée par la Société de leucémie et lymphome du Canada pour s’impliquer à titre d’ambassadrice qu’elle décide de faire le saut. Alors que certaines personnes préféreraient tourner la page, la jeune femme a plutôt décidé de voir cela d’une autre manière. « Je vais retourner du positif », conclut Alexandra, fière de pouvoir rendre à cette communauté qui l’a portée tout au long de cette épreuve.