« Pourquoi remercient-ils tous Beyoncé ? », peut-on lire en légende d’une vidéo TikTok où les chanteuses Adele et Lizzo acceptent une récompense sur scène.
Bien qu’elles aient en main le précieux trophée, c’est plutôt Beyoncé qui reçoit tous les honneurs de leurs discours, sous le regard attendri de cette dernière.
Même ce moment d’humiliation éternelle vécu par la chanteuse Taylor Swift à la cérémonie des VMAs de 2015, où le rappeur Kanye « Ye » West lui a arraché le micro des mains pour déclarer Beyoncé plus digne de recevoir le prix pour lequel elle était aussi nominée, sera réinterprété par les internautes comme un geste que le rappeur aurait posé afin de lui sauver la vie.
Selon les détectives du web, ne pas remercier Beyoncé sur scène serait passible de fin de carrière ou de vie.
Prenez Amy Winehouse ou Harry Styles, disparu depuis sa victoire aux Grammys de 2023.
Une théorie qui, sur TikTok, a même découlé en un trend humoristique — dans le sens « rire nerveux » — avec des internautes s’imaginant mourir subitement après avoir oublié de remercier Beyoncé suite à une réussite, une bonne nuit de sommeil ou un simple éternuement.
Très vite, cette conspiration aux apparences parfaitement absurdes a gagné en degrés d’horreur, tandis qu’Internet y ajoute quotidiennement des ramifications la menant ultimement vers le même point culminant : l’affaire P. Diddy.
Les mathématiques du complot
Beyoncé est née un 4 septembre. Son quatrième album s’intitule 4. Son mari, le rappeur Jay-Z, est né un 4 décembre. Il a aussi produit un album nommé 4:44.
Le couple s’est marié le 4 avril 2008. Le 4 juillet 2020, ils auraient été vus à une soirée organisée par un autre grand nom du hip-hop américain : P. Diddy.
Pour ajouter une couche de coïncidence, P. Diddy est aussi né un 4 (novembre) et a aussi pu compter sur 4 partenaires différentes pour lui donner une descendance.
Pour les internautes, il n’y a là aucun hasard, surtout suite à l’arrestation de P. Diddy le 16 (4×4) septembre dernier, pour des faits de trafic sexuel et d’extorsion remontant possiblement jusqu’à la fin du siècle dernier.
Depuis, les méninges virtuelles fonctionnent à fond la caisse et le vocabulaire de l’ère Illuminati de 2012 est dépoussiéré d’urgence par des internautes se donnant pour mission de trianguler suffisamment de coïncidences entre elles pour tenter de semer le doute quant à une conspiration sévissant dans l’ensemble de l’industrie du disque.
Prenez par exemple le cas de la chanteuse Aaliyah. Celle-ci a été photographiée le 4 juillet 2000 à une soirée donnée par P. Diddy. Un an plus tard, la chanteuse, alors au sommet de son succès, périssait à la suite d’un tragique crash d’avion, le 25 août 2001.
Ce même 25 (du mois de juin 2009) où décèdera l’illustre Michael Jackson. Et pendant qu’on y est, le rappeur Tupac n’aurait-il pas été assassiné alors qu’il avait 25 ans?
Parlant de Tupac, à quel producteur était signé Notorious B.I.G., son plus grand rival? À nul autre que Puff Daddy, AKA Puffy, Diddy, PD, Love, Father Love ou, aux dernières nouvelles, P. Diddy.
Mille et une raisons
Mais c’est bel et bien sous son vrai nom, Sean Combs, qu’il sera arrêté dans un hall d’hôtel new-yorkais, le 16 septembre dernier, suivant les agents fédéraux avec un calme aux antipodes des faits qui lui seront reprochés.
Poursuivons donc en chiffres : 120 allégations d’agressions sexuelles, dont une sur un garçon de 9 ans, et deux chefs d’accusation pour trafic sexuel et extorsion.
« Pendant des années, Sean Combs a utilisé l’empire commercial qu’il contrôlait pour abuser sexuellement et exploiter des femmes, ainsi que pour commettre d’autres actes de violence et d’obstruction à la justice », déclarait le bureau du procureur new-yorkais, faisant aussi mention de « travail forcé, d’enlèvement, d’incendie criminel [et] de corruption ».
Une arrestation encore impensable en novembre 2023, lorsque son ex-partenaire, la chanteuse Cassandra « Cassie » Ventura, faisait tomber le tout premier domino de toute cette affaire. Dans une plainte que P. Diddy s’empressera de régler à l ’amiable, elle décrit les sévices, menaces et humiliations subies au cours de leurs dizaines d’années de vie commune.
Et puis, quelques mois plus tard, le monde entier sera témoin des excès de Combs grâce une vidéo fuitée d’une violence inouïe dans laquelle on aperçoit le rappeur et homme d’affaires se lancer à la poursuite de Cassie dans un couloir d’hôtel pour la rouer de coups, confisquer ses bagages et la tirer grossièrement en direction de leur chambre.
Le caractère irréfutable de ces images provoquera le déclic nécessaire pour que d’autres voix s’élèvent, bien moins terrifiées par cet homme qui se serait régulièrement vanté de « faire disparaître » ceux qui l’importunent un peu trop.
Déclic qui donnera lieu à de premières perquisitions dans les villas de la star et qui déboucheront sur des découvertes pour le moins perturbantes.
Comme ces 1000 bouteilles d’huile pour bébé destinées à fluidifier les orgies — ou « freak offs » — de plusieurs jours que P. Diddy organiserait depuis plusieurs années.
« Il a une grande maison, il achète en gros. Je pense qu’il y a des Costco à tous les endroits où il possède une maison », tentera de le défendre son avocat, Marc Agnifilo, avant que le porte-parole de Costco ne s’empresse de démentir les faits, aucune bouteille d’huile pour bébé n’étant apparemment vendue par le détaillant sur tout le territoire américain.
Cette dernière défense réduite en cendre, les derniers soutiens publics de P. Diddy se réduiraient à présent à un cri du cœur de sa mère dénonçant le « lynchage médiatique » de son fils sur Instagram et à une réaction indignée du chanteur R. Kelly en direct de la prison où il purge une peine de vingt ans pour crimes sexuels sur personnes mineures.
Le fantôme de Jeffrey Epstein
Depuis l’arrestation de P. Diddy, chaque jour qui passe est un jour où Internet met à profit ses talents en montage vidéo pour prouver, une archive après l’autre, que ses freak offs n’avaient rien de secret.
À commencer par cet épisode de L’incroyable famille Kardashian de 2014 dans lequel Khloé Kardashian, de retour d’une de ces fameuses soirées, déclare que « la moitié des gens étaient complètement nus ».
« Il y a beaucoup de choses que je ne peux pas raconter », plaisantait aussi l’acteur Ashton Kutcher, en 2019, entre deux bouchées épicées à l’émission Hot Ones, tout en se remémorant des souvenirs confidentiels de soirées passées en compagnie de P. Diddy.
à l’époque, beaucoup voyaient comme un badge d’honneur le fait d’être convié à une soirée donnée par ce maître incontesté du nightlife des riches et célèbres.
Des acteurs Leonardo Dicaprio, Bruce Willis et Will Smith, aux chanteuses Mariah Carey et Aretha Franklin, aux jet-setteuses Paris Hilton et Kim Kardashian, sans bien sûr oublier Beyoncé et Jay-Z, tout le monde se bousculait pour être photographié en sa compagnie.
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TOutes les soirées de P. Diddy étaient-elles des orgies de 72 heures alimentées par la vodka Cîroc et la kétamine? Impossible pour l’instant de confirmer.
Reste que cette aura de mystère donnait à ceux et celles qui étaient exclus de la liste des invités ce même FOMO visible dans les yeux du présentateur Conan O’Brien, en 2002, lorsqu’il invitait P. Diddy à son talk show pour lui demander la recette de ses « soirées mortelles ».
« Il faut des verrous aux portes [et] pas de climatisation. La chaleur affecte l’alcool, mais tout le monde se sent aussi un peu plus à l’aise et détendu », énumérait P. Diddy.
Alors que le public éclatait de rire, Conan O’Brien, lui, semblait assez perturbé par ce qu’il venait d’entendre.
« Ça me paraît plutôt dangereux… », répondait prudemment l’animateur, provoquant de nouveaux rires dans l’assistance, mais aussi chez un P. Diddy parfaitement serein.
En 2024, sans doute regrette-t-il ces supposés conseils à la lumière des détails révélés au compte-goutte sur ces freak offs, que les témoignages dépeignent comme un cauchemar éveillé pour les victimes souvent mineures et non consentantes qui s’y trouvaient.
Pour les forcer à l’acte, P. Diddy aurait régulièrement fait usage de menaces, de coups ou de soumission chimique par substances ingérées jusqu’à l’inconscience, pour que le rappeur et ses invités d’élite se livrent ensuite à des agressions, que l’hôte filmait aussi bien pour son plaisir personnel que pour sa banque de chantage.
En ligne, plusieurs concluent que la seule chose séparant actuellement P. Diddy de Jeffrey Epstein est un pouls.
Quant au rappeur, il continue de clamer son innocence depuis son arrestation, bien que rien ne semble pour l’instant éloigner la menace minimale de vingt années de prison. Pas même un remerciement à Beyoncé.