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J’ai la chance de vivre un confinement relativement heureux. À une chose près: je résiste quotidiennement à l’idée de boire 4 ou 5 canettes de Coca-Cola d’affilée. Bien souvent, je cède à la tentation, au grand désarroi de ma conjointe désespérée. « Go cold turkey, babe! », me dit-elle dans sa langue maternelle en me suppliant d’arrêter. C’est ce qu’elle a fait, elle, pour arrêter la clope (2 paquets par jour): d’un coup, sans aucune aide. Elle en a bavé, mais elle l’a fait.
Mon dentiste m’a pourtant prévenue, à plusieurs reprises, que j’allais finir par morfler niveau caries. Le dernier traitement de canal que j’ai dû subir me hante encore. Mon médecin aussi m’a mise en garde: « je n’aimerais pas voir l’état de ton foie d’ici quelque temps. » Mais je n’arrive pas à décrocher. Pourtant, je flippe à l’idée qu’un jour cette maudite canette rouge et blanche soit à l’origine de mes plus gros maux. Ce qui me conforte et me perturbe, c’est que je suis loin d’être la seule.
« Je me levais pour en boire la nuit! Ça devenait une obsession »
Aux grands maux, les grands remèdes, Agathe a finalement pris rendez-vous chez une hypnothérapeute en avril 2017. « J’étais très motivée, mais l’arrêt me semblait utopique. La séance a duré 1h pendant laquelle on a abordé plein de sujets. Elle m’a expliqué que la dépendance au Coca suivait le même mécanisme que l’addiction à l’alcool ou au tabac. Depuis le 17 avril 2017, je n’ai plus touché à une goutte de Coca. Je suis fière de moi, je ne supporte pas l’idée d’être dépendante à quelque chose », raconte la jeune maman qui arrive même à tolérer que quelqu’un en boive devant elle, sans en avoir envie. Good job!
Malgré tout, ces années d’addiction auraient déjà laissé des traces sur son organisme. « J’ai eu des problèmes de foie, les médecins ont émis l’hypothèse que le Coca a pu aggraver quelque chose qui n’allait déjà pas bien sur mon foie… À ce sujet, on devrait se renseigner davantage sur la maladie dite “du foie gras” dans laquelle le Coca est incriminé: ça passe un peu l’envie d’ouvrir une canette. »
Huriye aussi a commencé à consommer du Coca dès son plus jeune âge, vers 8 ou 9 ans. « J’en ai toujours beaucoup bu, minimum 2 canettes par jour, mais vers la fin, je dirais entre 3-4 canettes par jour, durant plusieurs mois. J’ai compris que j’étais VRAIMENT accro quand j’ai réalisé que ça remplaçait l’eau… Dès que j’avais soif, j’ouvrais une canette. Parfois même, dès le réveil, j’en avais envie (besoin?) et je me faisais presque violence pour repousser au maximum ma première gorgée (généralement, je craquais vers 11h). »
Elle a tenté d’arrêter il y a quelques années en arrêtant d’en acheter, tout simplement. « Malheureusement, cela n’a pas fonctionné, je ressentais toujours l’envie d’en boire à toute heure. J’ai fini par craquer mais je pense que je n’étais pas très motivée non plus. Je ne réalisais pas encore à quel point c’était devenu une drogue », avoue celle qui estime aujourd’hui être sevrée et qui n’en achète plus du tout.
« J’ai compris que j’étais accro quand je me pressais de manger pour enfin boire mon Coca. Ou quand je me surprenais à boire du Coca à 8h du matin… le meilleur. »
Son conseil aux accros? « Arrêtez! Je sais que ça paraît impossible, mais une fois la phase de «manque» passée, on n’y pense presque plus. Finalement, je me dis que c’était plus facile que je pensais. Et ce qui est génial, c’est que maintenant, quand j’en bois, je le savoure pleinement », confie la puriste qui estime que le Coca et le Pepsi sont deux boissons radicalement différentes. « C’est comme si on demande du vin rouge et qu’on nous sert du rosé ! Et puis le Pepsi… ça a un goût sucré, chimique. Beurk! Désolée. »
Germain, quant à lui, n’a pas encore prévu d’arrêter. « Je bois du Coca depuis toujours, ça a commencé très jeune pendant des goûters d’anniversaire et pour d’autres occasions chez moi. Je pense avoir aimé le Coca avant d’aimer l’eau. Je ne bois pas du Coca tous les jours: ça détruit mon corps et la planète, je le sais bien », raconte mon collègue accro, toujours prêt à aller nous chercher une bouteille de Coke pour le bureau. « J’ai compris que j’étais accro quand je me pressais de manger pour enfin boire mon Coca. Ou quand je me surprenais à boire du Coca à 8h du matin… le meilleur. C’est un plaisir avant tout et c’est aussi un réflexe avec certains aliments, comme des burgers, des pizzas et surtout des sushis», avoue Germain qui n’estime pas être en manque pour autant.
« Est-ce que vous mettez de la cocaïne dans votre potion magique, ou pas? »
« Mais parfois j’y pense très fort, ça dure 10 secondes et ça passe. Mais peu importe l’heure, de jour comme de nuit, il n’y a pas d’heure pour un bon Coca bien frais… Ce qui me pousse à arrêter? L’impact néfaste sur la planète », confie le « buveur occasionnel », conscient que le sucre est ultra cancérigène. « Un conseil à mes potes accros: buvez plutôt de la grenadine! C’est la seule alternative qui me convienne, personnellement. Le Pepsi? Même pas en rêve, c’est dégueulasse », lance Germain qui pense connaître le secret de fabrication du Coca. « Mais par respect pour la marque, je préfère ne pas me prononcer (rires). »
J’ai évidemment contacté le service presse de Coca-Cola pour en savoir plus, en vain. « Est-ce que vous mettez de la cocaïne dans votre potion magique, ou pas? » La question nous démange tous, depuis la nuit des temps (1892 exactement). J’aurais pu leur demander ça directement mais non, je suis restée polie avec ceux qui nous incitent à « ouvrir du bonheur », à « savourer l’instant ».
« Je suis journaliste et je prépare un article intitulé “Arrêter le Coca”. J’ai interviewé plusieurs consommateurs et ex-consommateurs de Coca-Cola, tous me décrivent les mêmes symptômes de dépendance et tous seraient curieux de savoir ce qu’il y a réellement dans la recette “secrète” du Coca-Cola.
D’où l’objet de ce mail: si vous ne pouvez pas nous dévoiler la recette du Coca-Cola, pourriez-vous nous donner quelques indices?
Au plaisir d’avoir de vos nouvelles. »
Bref, je me suis pris un vent. En attendant, je me fais encore livrer cette satanée drogue en bouteille et je culpabilise à mort. Vous connaissez un.e bon.ne hypnothérapeute, vous? Vivement l’après confinement, qu’on prenne enfin nos vies en mains et celle de la planète.
Si seulement…
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