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Adrénaline, grêle dangereuse et mansplaining : 7 questions à une chasseuse de tornade

Catherine Laborde version badass.

Par
François Breton-Champigny
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Rares sont ceux qui se réjouissent lorsque le ciel se noircit et que la météo s’emballe. Mais pour une frange de la population, l’humidité, les vents forts et les gros cumulonimbus menaçants sont une source d’excitation puisque ce cocktail signifie qu’une tornade est peut-être à l’horizon.

Si ce phénomène peut être dévastateur et carrément mortel, il n’en demeure pas moins que des adeptes de la chasse aux tornades au Québec se ruent sur place pour assister à ce lugubre spectacle.

On s’est entretenu avec Jolyane Limoges, infirmière de profession, membre du groupe Xtrem Chase Québec et une des seules femmes chasseuses de tornade de la province, peut-être même de la planète selon elle, pour mieux saisir cette réalité.

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Quelle est ta définition d’un chasseur de tornade ?

Comment est-ce que la chasse aux tornades est apparue dans ta vie ?

Jolyane: J’ai toujours trippé sur les images de phénomènes météorologiques extrêmes et particulièrement sur les tornades. J’ai entendu dire que l’Oklahoma était la meilleure place pour chasser les tornades, donc un beau jour, j’ai décidé de paqueter ma petite voiture et de filer là-bas. Sur place, on me dit de me rendre à un certain endroit pour avoir la chance d’en attraper une, mais de faire attention à la grêle qui peut être très grosse et dangereuse.

Finalement, une fois venue sur place, je vois un début d’entonnoir et décide de foncer avec mon auto vers où il se trouve pour être plus près de l’action. De la grosse grêle commence à marteler mon bolide et à le briser ! Sur le coup, je trouvais ça drôle et excitant, mais avec du recul, je réalise à quel point je ne considérais pas les risques.

Je vois un début d’entonnoir et décide de foncer avec mon auto vers où il se trouve pour être plus près de l’action. De la grosse grêle commence à marteler mon bolide et à le briser !

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Aujourd’hui, lorsque je fais des voyages de chasse, j’ai de l’équipement approprié et je suis beaucoup mieux outillée, que ce soit en termes de techniques que de connaissances, pour apprécier le spectacle sans me mettre (trop) en danger.

Quelle chasse t’a le plus marqué ?

Jolyane: La tornade de Chapman en 2016 est définitivement une expérience qui restera gravée dans ma mémoire. C’était une F4, l’avant-dernier palier pour mesurer l’intensité d’une tornade, ce qui est très, très, très puissant. Mon partenaire de chasse de l’époque voulait tester une nouvelle approche et être encore plus près de la tornade. Finalement, on était tellement proche que le toit de la voiture se soulevait et des débris entraient par les fentes. Dans la vidéo complète, on peut m’entendre jurer et demander à mon partenaire de reculer tellement j’avais peur.

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Avec les tornades qui font la Une depuis quelques années, est-ce que le Québec est en voie de devenir une destination de choix pour les observer ?

Jolyane: Malheureusement, pas du tout ! Comme on a un territoire vaste avec beaucoup de relief et ponctué d’arbres, ce n’est vraiment pas idéal pour la chasse. Ce qu’il faut, ce sont des endroits plats avec peu d’obstacles. On en compte quelques-uns dans la province qui sont pas mal pour chasser comme dans le coin de Lachute, Mirabel et Lacolle.

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Est-ce que la communauté a changé depuis que tu fais ça ? Y a-t-il plus de femmes qu’avant ?

Jolyane: Depuis les dernières années, on sent vraiment un très gros engouement pour la pratique un peu partout à travers le monde et même ici au Québec. L’entreprise Spotter Network recense les chasseurs de tornades sur le globe et avant, je connaissais pas mal tous ceux que je voyais sur la carte dans la province, dans le reste du Canada et aux États-Unis, mais maintenant, il y en a des milliers et des milliers. Ça a donc explosé en peu de temps.

Depuis les dernières années, on sent vraiment un très gros engouement pour la pratique un peu partout à travers le monde et même ici au Québec.

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En ce qui a trait à la présence de femmes dans ce milieu, ça demeure très bas. Au Québec, je connais seulement une autre femme qui chasse à part moi. Je dirais qu’on doit être une trentaine dans l’ensemble de la planète à faire ça maximum. C’est difficile parfois d’évoluer dans un milieu presque exclusivement masculin. On se fait moins prendre au sérieux et on se fait mansplainer à tour de bras même si on connaît autant le sujet que n’importe qui d’autre.

Quel serait ton plus gros «trophée» de chasse ?

Jolyane: J’aimerais beaucoup voir une F5 de proche, le dernier palier sur l’échelle de puissance. Après ça, je pourrais passer à autre chose!

Que conseillerais-tu à quelqu’un qui veut commencer à chasser?

Jolyane: Je dirais de commencer au Québec pour bien apprivoiser le phénomène avant d’aller dans les grosses ligues aux États-Unis. Il faut aussi bien se renseigner sur comment fonctionnent les radars, les prévisions météorologiques et finalement, y aller avec des gens qui connaissent ça le plus possible si vous ne voulez pas que votre expérience tombe à l’eau ou vire au drame.

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