Logo

À la découverte de Younès

Montez le son.

Par
Clémence Carayol
Publicité

Younès Boucif, aka Younès, 25 ans, rappe depuis aussi longtemps qu’il sait parler (ou presque). Originaire de Rouen, il consacre sa vie entière au rap depuis trois ans et connait un succès grandissant. Si vous ne le connaissez pas encore, c’est normal: vous êtes au bon endroit.

Comment es-tu tombé dans le rap ?

Je me suis lancé dans le rap il y a 10 ans, sur les bancs du lycée. J’ai rencontré des potes qui sont devenus mes frères, comme le musicien Rilès. On partageait cette passion pour le rap et ça a pris de l’ampleur : j’ai voulu en faire plus à la fin de mes études. Mais j’avais fait un pacte avec mes parents: il fallait que je termine mon master de droit à la Sorbonne avant de me lancer corps et âme dans le rap.

Ensuite, j’ai fait une série de sons, « Les Rapports », et je suis apparu dans l’émission « Rentre dans le cercle » présentée par Sofiane. Ça m’a lancé et j’ai été signé par une maison de disque, Wagram. Je fais aussi partie du label de Rilès, Rilèsundayz. Aujourd’hui je vis de ma musique, mais avant ce n’était pas si évident.

Publicité

Pourquoi avoir choisi le rap parmi tous les styles musicaux ?

Parce que je n’ai pas de talent à part celui de dire ce que je pense constamment. Je ne sais pas chanter mais j’aime bien écrire, j’aime bien les rimes, j’aime bien les mots. J’aime le rap parce que ça me touche: c’est simple, authentique. J’aime le côté insolent, et dire des choses que les autres n’osent pas dire. Quand j’écris mes paroles, je veux kicker tout de suite, je ne veux pas chanter.

Quelle est la place du rap dans ta vie personnelle ?

De façon générale, je vis le rap comme un exutoire, une thérapie. Je vais dire ce qu’on ose pas dire, tout ce qui me révolte, tout ce qui est hypocrite, tout en étant sarcastique. J’adore la contradiction, et mes contradictions sont le premier objet de mon étude quand j’écris mes titres: je m’observe et j’observe les gens qui m’entourent. J’en déduis des choses, et j’écris. La vie réelle, moi-même, mes contradictions, les gens, c’est ça la matière brute de mes sons.

Publicité

Quel est ton rapport à la scène ?

La scène, je kiffe, je suis à l’aise et les gens me le rendent bien. Mes dernières expériences étaient dingues. J’ai fait la première partie du Tiger Tour de Rilès et plein de villes de France avec lui. C’était génial, un exercice de ouf: t’es devant 7000 personnes qui ne te connaissent pas et t’as 15 minutes pour faire une performance qui doit leur plaire et les inciter à te suivre après. J’aime le challenge, j’aime communiquer, j’aime être sur scène et m’exprimer, la scène est un beau lieu d’expression.

Tu penses quoi de la place de la femme dans le rap ?

C’est une femme qui m’a fait aimer le rap : Keny Arkana. Sa musique fait trop mal. Même si je kiffe beaucoup les rappeurs comme Hugo TSR, Médine, Youssoupha, Orelsan, c’est vraiment la talentueuse Keny Arkana qui m’a fait adorer le rap. Le rap n’est pas qu’un univers masculin même si, dans les faits, on voit plus de mecs que de meufs. Mais elles ont toute leur place. Pour moi, peu importe si l’artiste est une femme ou un homme. Quand une femme arrive avec son identité propre, qu’elle arrive à faire du rap militant lié à ses valeurs comme Keny Arkana, je kiffe. Il faut qu’elles soient fidèles à elle-même, authentiques, et leur musique le sera aussi.

Publicité

Les femmes sont-elles logées à la même enseigne que leurs collègues masculins ?

Non, il est plus difficile pour les femmes de s’imposer dans le rap comme dans tous les autres domaines de la vie en général, malheureusement. Dans le rap, l’image est très importante, il ne s’agit pas que des textes. Les gens jugent beaucoup. Il faut être strong, et c’est d’autant plus dur pour une femme qui va être immédiatement sexualisée. Et si par malheur des femmes décident de parler ouvertement de leur sexualité comme Megan Thee Station et Cardi B sur Wet Ass Pussy, elles seront attendues au tournant. Alors que c’est presque “normal” qu’un mec rappe sur ses désirs. Le rap, comme la vie réelle, est à deux poids deux mesures. Si le rap est proche de la société, il en est aussi un reflet.

Publicité