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À la découverte de L (Raphaële Lannadère)

Montez le son.

Par
Romain Amichaud
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Sa chanson L’étincelle est un véritable hommage au geste d’éclat d’Adèle Haenel aux Césars. Un formidable femmage, un hommage au féminisme en général. Se lever et quitter la pièce, comme un appel à l’action lancé par l’actrice et repris par L dans sa chanson et dans son clip. On a profité de la sortie du quatrième album Paysages de Raphaële Lannadère alias L pour discuter avec cette artiste tendre et engagée.

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Dans quel contexte as-tu créé ton album Paysages ?

J’ai commencé l’album en novembre 2019. La première session studio s’est passée dans un très beau gîte en pleine campagne. On était au coin du feu pour enregistrer les quatre premières chansons. Tu viendras est la chanson ADN du disque. Elle raconte quelque chose de fondamental pour cette période. À l’origine, c’est une lettre à mon frère quand je suis partie vivre en Bretagne, il y a deux ans et demi. Déjà, je ressentais un appel de la nature. Le changement climatique et l’effondrement des espèces m’interpellaient depuis un long moment. Je n’arrivais plus à vivre à Paris, j’avais envie d’entendre les oiseaux. J’ai un bébé de 19 mois aussi, je n’imaginais pas l’élever à Paris.

La deuxième session s’est déroulée en mars, juste avant le confinement. Ça m’a influencé pour la fin de l’écriture de l’album. Les oiseaux, Forêt sont venus à ce moment-là. Ça a beaucoup coloré l’ensemble du disque. La dernière session a été le 11 mai, premier jour du déconfinement, on a eu beaucoup de bol (rires) !

Il me semble que c’est le plus tendre que j’ai écrit. Entre nous, avec les musiciens, mes compagnons de route depuis 5, 10, 15 voire 20 ans. Cette amitié transparait dans notre musique.

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Aussi, pendant l’écriture, j’ai écouté Feist en boucle, comme une drogue mono-maniaque. Je n’ai écouté qu’elle, tous ses albums, sans fin.

Est-ce qu’Adèle Haenel a vu ton clip L’étincelle ?

Une amie en commun est tombée sur le clip et m’a demandé si je lui avais envoyé. Comme elle n’est pas sur les réseaux, elle lui a transmis. Deux heures plus tard, l’amie en question m’a demandé mon adresse email car Adèle voulait m’écrire. J’ai reçu un message d’elle absolument charmant, très encourageant, très doux, très chic. Ça m’a beaucoup émue.

Derrière ce geste, Despentes a écrit un texte extraordinaire. Si ma chanson, même pour quelques personnes, donne un peu de joie et de force. C’est ça qui est très fort dans le geste d’Adèle, ça autorise toutes les femmes à se lever et à quitter la pièce. Et pour ça, je lui suis infiniment reconnaissante. Au-delà des femmes, c’est la question des dominants et dominés.

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L’actualité a-t-elle une influence directe sur ton écriture ?

J’ai toujours suivi l’actualité et lu beaucoup la presse, depuis petite. Je suis régulièrement bouleversée par un article ou un documentaire et cela devient très souvent une source d’inspiration pour l’écriture. La musique apporte un souffle poétique face à la lourdeur de l’actualité. Ça permet à la fois une identification mais aussi beaucoup de distance. Ça m’aide à appréhender le monde. J’ai toujours beaucoup écrit de chansons engagées.

Aussi, le français supporte mal le premier degré, j’essaye toujours de trouver un angle poétique et symbolique. Pour Orlando (qui parle de la tuerie dans la boîte gay), les Amérindiens prennent la parole avec la nature. J’évoque aussi les questions d’identité, du combat des femmes (L’étincelle ou Femmes, vie, Liberté ! qui parlent du combat des femmes kurdes).

Quelle est la chanson dont tu es la plus fière ?

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Tu viendras est l’expression exacte de ce que j’avais envie de raconter à ce moment de ma vie. Je suis fière de L’étincelle et Genre aussi car c’est la première fois que j’arrive à faire des chansons aussi rythmiques. Enfin, Abel parce que c’est mon petit bébé.

Comment vis-tu la pandémie ?

Artistiquement bien. En revanche, j’ai une douzaine de dates de concert en suspens. J’espère qu’on va reprendre ce spectacle. Je n’ai jamais été aussi heureuse que sur scène. Il y a un espace de tendresse très grand avec les musiciens qui émane aussi du public envers nous. Je n’ai jamais ressenti cette douceur extrême. J’ai tellement hâte de retrouver les gens (rires) !