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5 personnes intersexes que vous devriez connaître
Homme ou femme ? Certaines personnes possèdent des caractéristiques physiques ou biologiques qui correspondent à la définition classique des deux sexes, ou pas complètement à l’un des deux : ce sont les personnes intersexes. Vous ignorez tout (ou presque) de cette catégorie de personnes ? Ce n’est pas grave ! A l’occasion de la quinzaine de visibilité intersexe, nous allons vous faire découvrir cinq personnes intersexes qui ont marqué leurs époques respectives.
Hanne Gaby Odiele
Né·e en 1988, le/la jeune belge débute une carrière dans le mannequinat à l’âge de dix-sept ans en rejoignant une agence basée à New York. En 2006, suite à un accident provoqué par une voiture qui a brûlé un feu rouge, iel se retrouve dans un état critique, avec les deux jambes cassées. Mais après plusieurs opérations et seulement quelques mois de séances de kiné, Hanne parvient à reprendre le chemin des podiums dès 2008.
Instagram, Hanne Gaby Odiele (@hannegabysees), 28 septembre 2017.
À partir de là, sa carrière décolle : iel défile pour les plus prestigieuses maisons de mode, telles que Chanel, Christian Dior, Kenzo, Saint Laurent ou encore Louis Vuitton. C’est en 2017 qu’Hanne Gaby Odiele décide de révéler à USA Today qu’iel est intersexe. Iel dénonce, au passage, les deux interventions chirurgicales que des médecins lui ont fait subir durant l’enfance et l’adolescence pour tenter de conformer son corps à ce qui est attendu d’une femme. « Ce n’est pas si grave d’être intersexe. Si les médecins avaient simplement été honnêtes dès le début… C’est devenu un traumatisme à cause de ce qu’ils ont fait », explique t-iel.
Depuis 2019, le/la mannequin se déclare non-binaire : « Toute ma vie, je me suis demandé : suis-je un garçon ou une fille ?, raconte Hanne à De Morgen. Aujourd’hui, cela n’a plus d’importance. Et c’est incroyablement libérateur. Je ne suis ni un homme, ni une femme : je suis Hanne. »
Im Seong-gu
L’une des plus anciennes histoires de personne intersexe connues remonte au XVIe siècle. Peu d’éléments de la vie d’Im Seong-gu sont parvenus jusqu’à nous. La plupart d’entre eux ont été rapporté par le huitième volume des archives de la dynastie Joseon (1392-1897). Dedans, iel y est décrit·e comme « un homme originaire de Gilju » en Corée, quelqu’un qui portait à la fois des vêtements dits masculins et féminins, et qui avait reçu une éducation féminine. Im aurait été marié·e avec un homme, qui serait décédé après avoir découvert son corps lors de leur nuit de noce. Im se serait ensuite marié·e à une femme.
En 1548, Im est accusé·e de troubler la société coréenne, au point que certains réclament la peine de mort. Le roi Myeongjong refuse, estimant suffisant de le/la condamner à un exil forcé.
Nul ne sait ce qu’est devenu·e Im Seong-gu ensuite. La preuve, en tout cas, que l’intersexuation n’a rien d’un « effet de mode » mais bénéficie simplement d’un intérêt et d’une visibilité que depuis peu.
Caster Semenya
L’une des personnes intersexes contemporaines les plus connues est certainement la sud-africaine Caster Semenya. En effet, l’athlète a tout d’une grande championne d’athlétisme : triple championne du monde en 800 mètres en 2009, 2011 et 2017, mais aussi double championne olympique dans sa discipline en 2012 et 2016.
Instagram, Caster Semenya (@castersemenya800m), 16 mai 2020.
Problème : le fait qu’une athlète intersexe concourt chez les femmes dérange certaines instances sportives. C’est ainsi que la veille de la finale des championnats du monde en 2009, la fédération internationale d’athlétisme, qui juge l’apparence et la voix de Caster assez masculines, l’oblige à se soumettre à des « tests de féminité ». Finalement, cela n’a aucune incidence sur sa carrière.
Mais en 2018, la fédération remet le sujet sur la table : un nouveau règlement impose dorénavant à Caster de prendre un traitement hormonal pour faire baisser son taux de testostérone, sous peine d’être considérée comme un homme. Caster Semenya refuse et se dit alors prête à mettre un terme à sa carrière si cela lui permet de garder « la tête haute ». Depuis, l’athlète, exclue des compétitions majeures, multiplie les recours devant la justice, sans résultat pour le moment.
Alexina Barbin
La France n’est pas non plus en reste en termes de personnes intersexes marquantes. C’est le cas d’Alexina Barbin, né·e dans le sud-ouest en 1838. Issu·e d’une famille pauvre, Alexina parvient, grâce à un riche bienfaiteur, à recevoir une éducation (ancrée dans la religion) et à obtenir son brevet d’enseignant·e.
Un jour, de vives douleurs le/la pousse à consulter un médecin, qui lui révèle son intersexuation. Aux yeux de l’état civil, Alexina devient un homme, la première à changer officiellement de sexe en France. Alexina décide alors de tout quitter, de sorte à éviter d’entacher la réputation du pensionnat où iel travaillait, de sa directrice, ainsi que de sa bien-aimée. Iel finit par partir s’installer à Paris pour ne plus avoir à subir toutes les personnes qui le/la dévisagent, se moquent, l’insultent ou le/la calomnient.
Là-bas, souffrant de la solitude, de la misère, et rongé·e par l’amertume, Alexina ne parvient pas à prendre un nouveau départ. En 1868, iel se suicide à vingt-neuf ans. Derrière iel, Alexina Barbin laisse ses mémoires, considérés comme l’un des premiers textes autobiographiques d’une personne intersexe au monde. Un objet littéraire de valeur à plus d’un titre donc, qui a permis à l’histoire de cet·te illustre inconnu·e de traverser les époques.
Sarita Vincent Guillot
Autre exemple de personne intersexe française marquante : Sarita Vincent Guillot. Né/e en 1965 en Île-de-France, Sarita est assigné·e homme à la naissance. Pourtant, durant l’enfance, iel subit une dizaine d’opérations pour que son corps se rapproche réellement de ce qui est attendu d’un homme. « Après la première intervention, mon petit frère naît. En le voyant nu, je comprends alors ce que je ne suis pas…», raconte Sarita dans un portrait dressé par Libération en 2017.
Ce n’est qu’à trente-sept ans, après un début de vie adulte fait de hauts et (beaucoup) de bas, qu’iel découvre, grâce à un reportage d’Arte, qu’iel n’est pas seul·e et qu’il existe un mot pour décrire ce qu’iel vit : l’intersexuation.
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Sarita se rapproche alors d’une association de personnes transgenres, qui le/la met en contact avec d’autres personnes intersexes. C’est ainsi qu’en 2004, Sarita co-fonde, avec le militant américain intersexe Curtis Hinkle, l’OII (Organisation Internationale des Intersexes) et s’active à visibiliser les personnes intersexes en France, ainsi qu’à défendre leurs droits à l’échelle européenne.
Aujourd’hui, Sarita Vincent Guillot continue de partager son expérience et de militer, jusqu’à l’ONU récemment, qui, pour rappel, a condamné la France en 2016 en raison de ce qui est considéré comme des mutilations sur les enfants intersexes.
Pour rappel, les personnes intersexes représentent environ 2% de la population mondiale, soit autant que de personnes rousses. De quoi ne plus nier ni négliger leur existence à l’avenir.