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3 questions à Antoine de Caunes

"Robinson Crusoé m’a toujours emmerdé"

Par
Anais Carayon
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En 1962, le grand journaliste Georges de Caunes décide de partir seul sur une île pendant un an. Par passion pour son métier et pour Robinson Crusoé, il laisse dernière lui son fils. Antoine de Caunes, 8 ans. Plus de soixante plus tard, le journal de bord de son père à la main, Antoine relate l’aventure de Georges. Dans une BD qui s’appelle Il Déserte (vous l’avez ?). Et c’est sublime.

Parler d’un père volubile et sociable, qui devient taiseux quand on parle d’intime et d’émotions, vous parlez à toute une génération. Voire deux ou trois.
Antoine De Caunes : Mon père a eu une enfance très mouvementée. Son père était très absent. Il a été enfermé dans un collège jésuite. Son père est mort quand il avait 16 ans. Trois ans après la guerre éclate. Il a eu l’impression d’avoir été volé de sa jeunesse. Ça l’a muré.
Je me rappelle très bien le jour où il m’apprend qu’il va partir un an. Un an, à cet âge, c’est l’éternité. Il y a une souffrance, mais j’ai les explications. Et très rapidement, je l’entends. Je lui veux et je l’admire. Tout le monde l’écoutait à l’époque. Tous mes copains m’en parlaient à l’école.

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Robinson Crusoé était très important pour votre père. Il vous a donné le livre. Vous aussi vous avez un livre culte ?
Moi, c’est l’Île aux trésors. Mon père avait posé deux livres sur ma table de chevet. Robinson et Cyrano. Cyrano parce qu’il était lui-même Gascon et parce que « c’est bien plus beau lorsque c’est inutile ». Mais Robinson m’a toujours emmerdé. Quand il rencontre ce pauvre Vendredi, il en fait tout de suite son esclave. Alors que Stevenson, c’est l’étincelle qui a mis le feu. Tous les trois ans, je relis mon livre préféré, Le Maître de Ballantrae. Mais je suis revenu à Defoe ensuite quand il a écrit l’histoire générale de la piraterie. Un livre ne s’impose pas, il faut le rencontrer au bon moment. C’est comme l’école qui faisait lire Racine à 15 ans.

Une dernière question : qu’est-ce qui vous a donné le goût de la connerie ?
J’aurais du mal à dater au Carbone 14, mais je crois qu’elle a toujours été là. J’avais une mère très rieuse. Qui voyait toujours la vie du bon côté comme disent les Monty Python. J’ai grandi avec l’idée qu’il ne faut pas prendre tout ça au sérieux.

La BD Il Déserte est sortie aux éditions Dargaud.
Photo : Rita Scaglia.

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