.jpg)
2015 en musique: Kendrick Lamar, Uptown Funk et… Jean Leloup!
Pour célébrer la fin de la décennie, on jette un coup d’œil sur la musique qui a marqué chacune de ses années. Ici, on aborde 2015, une année où les mélomanes ont attendu douze mois pour ne jamais recevoir les albums qu’ils espéraient.
Autant le concept de l’album surprise était déjà bien établi rendu en 2015 – Drake a sorti son meilleur projet des cinq dernières années avec If You’re Reading This It’s Too Late – certains artistes ont peut-être un peu vendu la peau de l’ours avant même d’avoir acheté le matériel nécessaire. C’est ainsi que Kanye West et Rihanna annoncent déjà la sortie imminente d’un nouvel album et présentent des extraits dès le mois de janvier. Les projets sortiront finalement à l’hiver 2016 sans ces chansons. Idem pour Frank Ocean, qui annonce un nouvel album pour l’été. Dans son cas, il avait raison, il a juste oublié de spécifier que c’était pour l’été 2016. Reste que d’autres personnes sont venues à la rescousse pour sauver l’année 2015, qui aura été fantastique malgré les absents.
Le hit de l’année
Oubliez la chanson de l’été : les plus grosses chansons débarquent maintenant à l’hiver. Un an après Happy, c’est au tour du producteur britannique Mark Ronson et de Bruno Mars de faire danser les souffleuses. Uptown Funk devient un succès sur toute la ligne. On savait déjà que Mars était tout un interprète, mais il atteint un autre niveau avec la pièce. Il chante, il crie, il rappe, il danse, il demande même à son bon pote Julio de lui appeler une limousine.
Ronson fait aussi tout un travail pour aller chercher le meilleur des chansons funk des années 1980 pour offrir une trame qui aurait fait frémir Michael Jackson. La chanson brisera éventuellement le record de l’époque avec 15 millions d’écoutes en streaming en une semaine. Elle passera la moitié de l’année dans le top 3 aux États-Unis, dont quatorze semaines en première place. Plus qu’un succès radio, c’est un véritable événement culturel.
Autres succès
The Weeknd devient une mégastar internationale en 2015. Vrai que les amateurs de R&B connaissaient peut-être déjà ses premiers mixtapes. Mais avec l’album Beauty Behind the Madness, il est maintenant une vraie vedette de la pop. En s’associant au producteur Max Martin, il atteint le sommet du palmarès américain pendant trois semaines non consécutives avec Can’t Feel My Face, une chanson qui inspire la même aura qu’Uptown Funk. Il va ensuite se remplacer lui-même avec The Hills, chanson beaucoup plus sombre. Si on rajoute à tout ça sa pièce Earned It, qui grimpe les palmarès au début de l’année avec la sortie du film Fifty Shades of Grey, on peut dire qu’il a passé une bonne année.
Au travers des autres hits de Fetty Wap, Taylor Swift et Wiz Khalifa avec Charlie Puth, deux artistes frappent un grand coup autant grâce à de grosses chansons que le vidéoclip qui les accompagne. D’abord, au Québec, tout le monde vire fou lorsque Xavier Dolan réalise le nouveau vidéoclip d’Adele. Si bien que même les bulletins de nouvelles présentent des extraits de Hello. Pour la chanteuse britannique, c’est un retour sur disque après quatre ans d’absence. Il ne faudra que 87 jours pour que le clip dépasse le milliard de vues sur YouTube. Aucun album n’a vendu autant de copies dans l’histoire du Canada que 25.
Le clip le plus marquant de l’année appartient toutefois à Drake et Hotline Bling. Le concept en soit est assez simple : Drake danse comme un monsieur avec trop d’émotion. Le réalisateur Director X enveloppe le tout avec de jolis décors minimalistes et le tour est joué. Il pleut des parodies partout sur le web. Encore aujourd’hui, il n’est pas rare de voir Drake avec son manteau d’hiver donner ou non son accord dans un mème.
Au Québec
John the Wolf is back! On le croyait parti pour de bon, mais voilà que Jean Leloup débarque à l’improviste avec l’album À Paradis City et la presque pièce titre Paradis City. Non seulement les fans de l’ancien Leloup le suivent dans l’aventure, la nouvelle génération embarque aussi dans le projet. En tout, Jean Leloup remporte cinq trophées au gala de l’ADISQ, dont interprète masculin et chanson de l’année, deux prix qui impliquent le vote du public. L’album ne dépasse peut-être pas Le Dôme dans la discographie de l’artiste, mais la chanson titre devient assurément l’une des chansons marquantes de la décennie.
Ariane Moffatt est elle aussi une artiste bien établie en 2015. Son album 22h22 la voit revenir sur le chemin du succès. Sa chanson Debout fait également beaucoup de vagues à la radio. Au même moment, Cœur de Pirate s’essaie comme artiste bilingue. Oublie-Moi, version en français de Carry On obtient un énorme succès. J’en profite pour rappeler que son album Roses ne reçoit vraiment pas tout l’amour qu’il mérite.
Succès critiques
En pleine effervescence du mouvement Black Lives Matter aux États-Unis, Kendrick Lamar revient avec, sans contredit, l’album de l’année. Politique, engagé, sensible, réfléchi et, par moments, franchement délirant, To Pimp a Butterfly devient un classique la seconde même de sa sortie. L’album passe du free jazz au funk au soul au rock, avec King Kendrick toujours bien en selle. Pour faire l’album, le rappeur de Compton est allé partout, du repère blues de Saint-Louis à l’Afrique du Sud. Lors de manifestations contre l’injustice raciale ou la brutalité policière, le refrain de la pièce Alright se fait entendre comme un nouvel hymne.
Drôle de phénomène que celui de l’album Emotion de Carly Rae Jepsen. Trois ans après Call Me Maybe, la chanteuse pop canadienne ne peut répéter son succès. Qu’à cela ne tienne : le projet devient rapidement un cri de ralliement pour les fans de pop, surtout les fans de pop LGBTQ2IA+. Tout d’un coup, Carly Rae passe de vedette radio à chouchou des critiques. Au lieu de compter sur un public volatile, l’album lui permet de se créer une fanbase dévouée et solide. Allez dans une soirée gaie remplie de milléniaux et faites jouer Run Away With Me, vous allez comprendre.
Au Québec, on découvre Safia Nolin, nouvelle sensation de la chanson folk. Ses chansons n’ont rien de joyeux, mais avec Limoilou, elle réussit malgré tout à réchauffer bien des cœurs à l’automne. En même temps, Philippe Brach fait paraître un deuxième album en autant d’années avec Portrait de famine. Sur ce disque aux accents folk rock déjantés, l’auteur-compositeur-interprète se taille une place de choix dans le paysage musical québécois.
En 2015, je danse autant sur la musique de Grimes que du groupe rock Tame Impala. Autant Art Angels que Currents prennent des virages pop inattendus, mais très bien exécutés. Idem pour Jamie xx. Le musicien et producteur du groupe britannique The xx fait paraître un premier album solo très réussi. Malgré toute cette joie, mon album préféré est le projet intime et personnel Carrie & Lowell de Sufjan Stevens. Le projet de onze chansons explore la relation trouble entre Sufjan et sa mère récemment décédée, qu’il ne visitait que quelques semaines par année durant son enfance. À ce jour, j’ai encore des frissons quand j’écoute No Shade in the Shadow of the Cross. Et là bon, je l’écoute, et j’ai les larmes qui remontent. C’était inévitable.